Au mois d’octobre, l’équipe de l’Observatoire de l’Espace a accompagné Stéphane Thidet au LISA (Laboratoire Interuniversitaire des Systèmes Atmosphériques) à l’Université Paris-Est Créteil. Noël Grand, en charge du projet, l’a accueilli dans la salle blanche du laboratoire où se déroulaient les premiers essais sur le modèle de qualification d’IR-COASTER/OSCAR. Ce modèle est en tout point semblable au modèle de vol qui sera envoyé sur l’ISS et sert de modèle-test. Stéphane Thidet livre ses impressions d’artiste immergé dans l’univers scientifique :

« La première fois que j’ai entendu parler de la salle blanche, une image aussi enfantine qu’irréelle m’est apparue, le même effet s’était produit avec l’expression boite à gants qui désigne les caisses de manipulation dans les laboratoires. Chaque milieu a son vocabulaire spécifique, il en est de même pour la recherche spatiale.

Cette salle blanche, j’y entre enfin ce matin. Cet espace clos est protégé des particules extérieures par un sas et un protocole d’entrée. Noël me demande mon téléphone, afin de le nettoyer à l’alcool. J’ai pu le garder avec moi pour cette visite, car il s’agit de l’assemblage du modèle de qualification d’IR-COASTER et d’OSCAR. J’aurais dû le laisser à l’entrée s’il avait été question du modèle de vol qui ne doit subir aucune contamination. Je remarque que Noël est stressé par le temps : tout doit fonctionner avant lundi, jour où cette machine complexe sera soumise à différents tests de chaleur, de vibrations… Dans le sas, nous retirons nos chaussures et mettons nos combinaisons blanches. Une fois le protocole terminé, nous pouvons accéder à cette mystérieuse pièce. L’ensemble de la salle est classé ISO 4, une norme qui indique la quantité de poussière tolérée par unité de volume. Au fond, j’aperçois, dans ce qui ressemble à une boite transparente, IR-COASTER et OSCAR, ouverts, tout câble dehors, comme un animal en pleine opération chirurgicale. Noël m’invite à m’approcher doucement, et surtout à ne toucher ni les rebords de la table, ni les parois de la boite qui est, elle, classée ISO 7.

Ce n’est pas tous les jours dans la vie d’un artiste que l’on a l’opportunité de travailler sur un projet qui se déroulera dans l’Espace, et de se trouver intégré à une équipe de chercheurs, mécaniciens spatiaux, ingénieurs… toute cette force collective concentre et articule ses savoirs en vue d’une réussite aussi ambitieuse que fragile ; et dans le but de concevoir un objet que nous ne verrons jamais dans le contexte pour lequel il a été construit. Je suis fasciné par la précision de tous les éléments qui constituent l’IR-COASTER… et ému de découvrir OSCAR, fabriqué avec ses matériaux réels… je me remémore la première maquette en bois et billes de verre que j’avais bricolé dans mon atelier de la Goutte d’or.

Ce projet est avant tout une aventure humaine, un partage des savoirs et des intuitions. Je m’aperçois que les chercheuses et chercheurs en aérospatiale fonctionnent un peu comme les artistes : ils et elles s’adonnent à un travail sans relâche, dans un certain isolement, au service d’un projet qui fonctionnera peut-être. Ils travaillent avec souplesse pour être toujours prêts à s’ouvrir à différentes alternatives lorsque les rattrape le principe de réalité. Tout cela est projeté par l’imagination, et bien souvent solutionné par des systèmes D…

Ça, je connais. »

Les essais mécaniques et thermiques passés avec succès, il reste au modèle de qualification d’IR-COASTER/OSCAR une dernière étape de validation avant la construction du modèle de vol.

Stéphane Thidet au LISA

Stéphane Thidet au LISA ©Observatoire de l’Espace, CNES